Signifiant « forêt de montagne » en vieux gaulois, le massif du Jura est composé de plusieurs forêts. L’immense forêt de Chaux dans la plaine, deuxième plus vaste forêt de feuillus de France, les forêts d’altitude comme la forêt du Massacre ou celle du Risoux, ainsi que la plus grande sapinière d’Europe, la forêt de Joux et du seul grand affleurement de socle cristallin dans le Jura, la forêt de la Serre.
Hormis la forêt de Chaux, forêt de plaine à feuillus, les forêts montagnardes ou « joux » sont des forêts « noires », dominées par les résineux. Ceci n’est vrai que depuis 3000 ans environ où, à la suite d’une baisse des températures, la hêtraie-sapinière a colonisé progressivement la montagne et remplacé la chênaie mixte. Par la suite, l’homme a éliminé les résineux de manière à favoriser les « arbres à fruit » (fruitiers, chênes, hêtres). Le sapin céda progressivement sa place à l’épicéa car il était beaucoup plus recherché pour la fabrication de la poix mais aussi pour alimenter la construction navale, les salines ou l’industrie métallurgique (production de charbon) au début du XIXe siècle.
EN QUELQUES CHIFFRES
Superficie : 250 000 ha soit 50% de sa superficie
Altitude minimale : 300 m
Altitude maximale : 1 720 m (crêt de la Neige)
Précipitations annuelles : entre 1000 et 1800 mm
Température moyenne : de 5,6 °C et 10,3 °C (-36,7 °C)
Géologie : terrains calcaires et marneux
Taux de reboisement : 50%
Principales essences : Hêtre, Chêne, Sapin, Epicéa
Un milieu fragile
En forêt, certains arbres peuvent être touchés par des problèmes sanitaires conduisant à leur dépérissement. Les peuplements d’épicéas, en contexte de plaine, sont souvent victimes d’attaques parasitaires. Le principal responsable est un insecte, le Scolyte. Les femelles fécondées creusent des galeries sous l’écorce et y déposent leurs œufs. Après l’éclosion les larves se développent perpendiculairement de part et d’autre de la galerie principale ce qui forme un schéma caractéristique. Le développement des insectes détruit des cellules permettant la circulation de la sève ce qui provoque la mort de l’arbre. A chaque génération les scolytes se multiplient rapidement, une femelle peut pondre jusqu’à 80 œufs.
Les scolytes font partie de l’écosystème forestier et leurs attaques ont lieu tous les ans avec une intensité en général modérée. Les conditions climatiques particulières de 2018 et 2019 (chaleur, sècheresse) ont engendré un affaiblissement des arbres et une pullulation des scolytes provoquant des attaques massives et conduisant à un dépérissement important des peuplements d’épicéas dans les forêts de Franche-Comté.
Les arbres attaqués sont facilement repérables dans le paysage par le changement de la couleur de leurs aiguilles, virant du vert au brun, puis par leur disparition totale.
La seule alternative pour limiter l’expansion de ces insectes reste la coupe des tiges attaquées et l’enlèvement rapide des bois. Sur des peuplements peu impactés, l’exploitation des seuls bois atteints par les scolytes peut être suffisant. En revanche, sur des peuplements plus touchés, il peut être nécessaire d’enlever tous les épicéas restants en une seule opération que l’on appelle une coupe rase. Par la suite, en remplacement des épicéas, les forestiers plantent de jeunes arbres ou favorisent des repousses naturelles, reconstituant ainsi la forêt pour les générations à venir.
Dans cette perceptive, la DRAAF et FiBois Bourgogne-Franche-Comté ont mandaté le Parc naturel régional du Haut-Jura pour étudier, en concertation avec l’ensemble des acteurs du territoire, la faisabilité de la mise en place d’un dispositif permettant la détection et la neutralisation précoce des attaques de scolytes. Le but est d’enrayer la propagation des insectes afin de protéger les pessières d’altitude. L’analyse des retours d’expérience existants permettra de proposer un protocole d’intervention à adapter aux spécificités du territoire.
Un sanctuaire de biodiversité
Le Grand tétras, hôte ancestral et discret des forêts d’altitude du Haut-Jura, est un oiseau rare qui affectionne tout particulièrement les boisements clairs d’épicéa et de sapin, sous lesquels il consomme myrtilles et bourgeons à la belle saison. En hiver, il se nourrit uniquement d’aiguilles de sapin ou de pin et se déplace très peu, restant essentiellement perché. Très farouche, il s’envolera toutefois s’il est dérangé, et puisera alors dans ses maigres réserves. Du fait de cette extrême sensibilité, et de la raréfaction des milieux forestiers favorables à l’espèce, le grand tétras est en danger d’extinction sur le massif jurassien. Il ne reste que 250 à 300 individus côté français, répartis en petites populations.
Afin d’inverser cette tendance, l’Etat français a missionné le Parc naturel régional du Haut-Jura afin de décliner, sur le massif, le Plan national d’actions en faveur du Grand Tétras. Ce dernier est construit avec l’appui du Groupe Tétras Jura (GTJ) et en partenariat avec nombre d’acteurs du territoire comme l’Office national des forêts (ONF) et l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS).
La forêt est avant tout le lieu de vie d’innombrables espèces : oiseaux, insectes, champignons, chauves-souris… Parfois rares, souvent fragiles, elles font toutes partie intégrante du cycle forestier. Pour vivre, ces espèces ont besoin de gros bois et de bois vieillissants. Les arbres offrent des habitats pour cette multitude d’espèces : cavités, fentes, branches mortes… sont leurs refuges, leurs zones d’alimentation, de reproduction, d’hibernation. De même, ces bois vont finir par mourir et par s’effondrer favorisant l’installation de semis (l’avenir de la forêt).
L’exploitation forestière a raccourci le cycle naturel de la forêt. Aujourd’hui, vieux bois et gros bois sont très rares dans nos forêts, fragilisant la biodiversité forestière mais aussi le cycle naturel de l’écosystème forestier. Ainsi, dans le cadre des actions Natura 2000, le Parc naturel régional du Haut-Jura encourage la mise en place d’îlots de sénescence.
Un îlot de sénescence est une zone forestière laissée en vieillissement naturel, favorisant ainsi l’apparition de bois morts sur pied et au sol. Il s’agit de construire un réseau d’arbres vieillissants et/ou dépérissants, sous forme d’arbres isolés ou d’îlots, afin d’assurer une continuité favorable à la mobilité des espèces animales. Sur ces îlots, il n’y a aucune exploitation sur une période de trente ans, laissant ainsi la forêt reprendre son cycle naturel.
Sous l’égide de la Société Forestière de Franche-Comté, le Centre Régional de la Propriété Forestière et l’Office National des Forêts se sont intéressés aux conséquences du changement climatique sur les forêts de Franche-Comté à travers des constats alarmants et des perspectives d’évolution modérées. Ils traduisent ainsi le fonctionnement d’écosystèmes déjà impacté par l’élévation de la température moyenne entrainant des vagues de sécheresse, des périodes de canicule et des risques d’incendies importants. Mais également par la modification des cycles saisonniers engendre une floraison plus précoce de même qu’un accroissement des forêts ce qui créé une augmentation du taux de concentration du CO2 et des dépôts azotés. La prolifération de parasites et ravageurs tels que Scolyte, Oïdium et Chenille processionnaire est aussi favorisée par les effets du réchauffement au même titre que l’évolution des aires de répartition des principales essences forestières et des espèces floristiques et fauniques.
SOURCE : PNR DU HAUT-JURA / ONF / IGN / JURA TOURISME
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